Autoédition : quand le tout numérique rend au papier sa valeur

Cela fait quelques temps maitenant que je publie mes nouvelles sous licences libres. Ce choix est le résultat d’une réflexion sur ma propre consommation de divertissement. Il est aussi la réponse à un questionnement sur le « statut » d’autoédité : que puis-je faire maintenant qui serait irréalisable avec une maison d’édition ?

Publier des nouvelles, publier sous licence libre et publier gratuitement sont les premières réponses qui me sont venues à l’esprit, et j’ai évolué vers cette ligne de conduite pour la soixantaine d’histoires que j’ai écrites jusqu’ici.

De l’autoédition à l’autoproduction

L’ultra-disponibilité du numérique ne fait pas tout. Beaucoup de gens restent attachés à la lecture sur papier. Quand est venu le moment de me quesitonner sur les différents modes d’autopublication pour une version physique, trois options se sont ouvertes :

  • faire imprimer mon livre chez un professionnel, ce qui aurait impliqué le stockage à domicile d’un certain nombre de volumes (et m’aurait coûté très cher en-dessous de cent exemplaires) ;
  • déposer mon manuscrit dans une firme d’impression à la demande, qui fabriquerait des livres au fur et à mesure des commandes, ce qui évite le problème du stock à domicile mais cause celui de la marge beaucoup moins importante pour l’auteur ;
  • le « print on demand » devenu classique sur Amazon (que je détache des autres modes d’impression à la demande), qui bénéficie de tous les avantages liés à cette plateforme, mais dont le produit fini est souvent décevant, sans qu’on ait grande prise sur le lieu ou les conditions de fabrication (avec les deux premières options, il était possible de sélectionner une firme sur base de ces critères par exemple).

Tout cela était pour moi assez peu satisfaisant en l’état, et encore davantage avec cette raison supplémentaire : avoir publié sous licences libres et gratuitement rendait nécessaire de rechercher une plus-value à la version « papier ».

Que puis-je faire qui soit différent, qui sorte du lot, qui donne envie d’aller au-delà de la simple lecture ? Que puis-je faire qui se détache à la fois du travail d’une maison d’édition et des tendances globales dans l’autoédition ?

La réponse que j’ai choisi d’apporter est de fabriquer les livres moi-même, à la main, en tirage limité et en impression à la demande.

C’est ainsi que je me suis lancé dans la manufacture de livres.

Le premier a avoir été fabriqué est Au creux des vagues et des dunes« , que j’ai plié et cousu sur un papier très agréable. La reliure copte est idéale pour débuter. Les plats de couverture ont été sérigraphiés en bichromie, un défi de plus dans cette aventure. J’en ai tiré une vingtaine d’exemplaires.

Plus récemment est venu le premier volume de l’intégrale des Horizons parallèles. Ce recueil de 13 nouvelles est imprimé et fabriqué à la demande.

Après avoir sélectionné soigneusement les différents papiers et le matériel nécessaire, j’imprime, plie, couds, colle, puis recouvre l’ouvrage de plats, d’un dos et enfin d’une splendide jaquette couleur.

L’ensemble, depuis son écriture jusqu’au design de la jaquette, a été réalisé à l’aide de logiciels libres. Tout est fait maison mis à part le papier marbré des gardes (j’achète du papier marbré) et l’impression de la jaquette (cette impression couleur sur un format très particulier est difficilement envisageable à la maison).

Chaque exemplaire est numéroté, et le tirage sera limité à 100 exemplaires seulement par volume.

Si cette fabrication à la demande n’est pas de tout repos (loin de là), elle apporte une satisfaction immense que j’espère transmettre en vous l’envoyant. Il y a un an de cela, jamais je n’aurais cru être en mesure d’acquérir une telle autonomie dans la production de livres. Chaque objet émanant de cette micro-production est unique et attend une place quelque part sur une bibliothèque. Chacun est passé entre mes mains.

Trois modes de lecture sont donc désormais disponibles pour découvrir les Horizons parallèles :

Quand le tout numérique rend au papier sa valeur

Ce qui est intéressant avec cette transition vers les ouvrages physiques, c’est que je n’aurais probablement pas cherché à produire des livres papier de cette qualité sans être passé par la case numérique. Est-ce qu’à sa manière, l’e-book serait en train de rendre au livre sa véritable valeur, celle d’un objet précieux qui compte plus que les histoires qu’on y trouve ? Je le crois.

Nous avons la possibilité d’aller au-delà du livre jetable si nous le souhaitons, de proposer une alternative qui ne dépend du bon vouloir de personne si ce n’est du nôtre au moment de sa création. Nous avons le pouvoir de créer des livres qu’on ne voudra pas donner le jour de notre prochain déménagement, qu’on emballe soigneusement avant de les mettre dans notre sac.

Ce n’est probablement pas une voie à emprunter exclusivement… mais nous aurions tort de ne pas la faire exister.

Photo by Celine Nadon on Unsplash

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3 commentaires

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  1. J’apprécie le fait de chercher à faire autrement, différemment. Je trouve intéressantes les réponses aux questions que tu t’es posées, et remarquable ce défi de la fabrication manuelle de l’objet de papier ; mais justement, et puisque j’ai découvert ton activité tout récemment (par un détour sur Diaspora), je me demandais comment tu avais appris à fabriquer (à relier notamment), ou comment tu apprenais encore : à l’aide de ressources sur internet et à force d’essais, ou peut-être lors de formations plus traditionnelles en université… ?

    • Merci pour ce commentaire. J’apprends à force d’essais et d’erreurs, guidé par un livre, « 100 modèles de reliure créative » d’Alisa Golden et par différentes techniques accessibles en vidéo, comme celles des chaînes « Sea Lemon » et surtout « DAS bookbinding ». Ces différents médias et les astuces qu’ils proposent m’ont permis de trouver une façon de faire satisfaisante.